L’agriculture syntropique

Genèse et Origine de la Syntropie

L’agriculture syntropique (ou agroforesterie successionnelle) est une philosophie et une pratique conceptualisée au Brésil dans les années 80 par Ernst Götsch. Cet agriculteur et chercheur suisse a développé tout au long de sa vie des techniques qui concilient production agricole et régénération des paysages et des sols.

L’agriculture syntropique, c’est d’abord et avant tout un changement de perspective. Il s’agit d’une nouvelle proposition de lecture de l’écosystème, qui utilise un autre raisonnement basé sur la coopération et l’amour inconditionnel comme moteur de l’interaction entre espèces. L’agriculture syntropique traduit les processus naturels en interventions agricoles, et invite ainsi l’Humain à retrouver une place juste et bénéfique au sein du Vivant.

Cette pratique d’agroforesterie successionnelle existerait déjà depuis bien longtemps : les peuples premiers utilisaient des pratiques agricoles similaires il y a déjà quelques milliers d’années.

Nous ne sommes pas les intelligents du système, mais faisons partie d’un système intelligent – E.Götsch

Ernst Gotsch avec une machette dans une ligne syntropique de cacaoyer
Crédits : agendagotsch

Définitions et concepts en syntropie

Deux lignes syntropiques de trois ans d'age plantées à la ferme des Mawagits
Lignes syntropiques de 3 ans
La ferme des Mawagits – Gers
Deux lignes syntropiques de trois ans d'age plantées à la ferme des Mawagits
Lignes syntropiques de 3 ans
La ferme des Mawagits – Gers

L’agriculture syntropique vise à créer des agro-écosystèmes productifs & résilients imitant les écosystèmes naturels environnants, en termes de structure (dimension multi-étagée), de dynamique (succession écologique) et de fonctionnement (perturbation, haute densité, haute diversité …).

En accord avec la philosophie développée par Ernst Götsch et ses expérimentations en climat tropical, l’agriculture syntropique nous invite à revenir à notre juste place : là où nos actions individuelles et collectives, en interaction avec le reste du vivant, sont bénéfiques pour l’ensemble de l’écosystème. Ainsi l’agriculture syntropique se veut être à la fois une approche philosophique du vivant, et une approche agronomique régénératrice.

La syntropie est la notion complémentaire de l’entropie. L’entropie est décrite par la seconde loi de la thermodynamique qui établit que tout système clos tend à la simplification et au désordre. Une évolution syntropique est une force qui pousse les systèmes vivants vers des niveaux de plus en plus élevés d’organisation, d’ordre et d’harmonie dynamique.

Les végétaux en sont un bon exemple, à travers la captation et l’accumulation de l’énergie solaire sous forme de biomasse grâce à la photosynthèse. Une fois restituée au sol, cette biomasse vient enrichir le milieu en augmentant sa fertilité. Au fil du temps, les formes de vie et les interactions entre êtres vivants se complexifient et viennent créer des milieux plus riches et abondants.

Cette complexité et cette diversité leur permet d’être en mesure de s’adapter et de se régénérer suite à des perturbations (incendies, tempêtes, animaux etc.) c’est-à-dire d’être plus résilients.

Une parcelle plantée en syntropie dans sa deuxième année de pousse au Verger au bois gourmand
Agro-écosystème dans sa 2e année de pousse
Le Verger au Bois Gourmand – Bretagne
Une parcelle plantée en syntropie dans sa deuxième année de pousse au Verger au bois gourmand
Agro-écosystème dans sa 2e année de pousse
Le Verger au Bois Gourmand – Bretagne
Un exemple de nid de graines sur une ligne syntropique à la ferme du Bosquet
Nids de graines
La ferme du Bosquet – Gironde
Un exemple de nid de graines sur une ligne syntropique à la ferme du Bosquet
Nids de graines
La ferme du Bosquet – Gironde

La vision de l’agriculture syntropique demande de voir la Terre comme un seul macro-organisme où tous les composants sont interconnectés et interdépendants. Chaque individu de chaque génération et de chaque espèce y a une place et une fonction. En réalisant leurs fonctions, ils modifient les conditions du milieu pour que de nouvelles formes de vie, plus complexes, apparaissent. La succession naturelle des espèces est le processus par lequel la vie évolue dans l’espace et dans le temps.

L’agriculture syntropique, c’est passer d’une agriculture d’intrants à une agriculture d’informations et de processus (E.Götsch)

Les principes clés de l’agriculture syntropique

L’agriculture syntropique repose sur de nombreux principes philosophiques et agronomiques accessibles sur le ‘TAO pour notre compréhension de la vie‘ écrit par E.Götsch. Nous vous présentons ici les 6 principes clés qui permettent de comprendre les fondamentaux de l’application pratique de la syntropie.

Un exemple de haute densité sur une ligne syntropique à la ferme du Bosquet
La ferme du Bosquet – Gironde
Un exemple de haute densité sur une ligne syntropique à la ferme du Bosquet
La ferme du Bosquet – Gironde

Maximiser la photosynthèse

Le soleil est la source d’énergie qui permet aux plantes de se constituer et de croître. La photosynthèse est le mécanisme qui permet de convertir du gaz carbonique et de l’eau, en sucre, oxygène et de nouveau en eau. Les systèmes syntropiques sont conçus pour maximiser la captation de l’énergie solaire afin d’optimiser la photosynthèse.

Haute densité & diversité

Ce principe consiste à planter à très haute densité une grande diversité d’espèces végétales. Cela implique la cohabitation de nombreuses espèces, dans l’optique de maximiser la captation d’énergie solaire et de créer des synergies positives. Chaque plante joue un rôle complémentaire, ce qui contribue à la bonne santé globale de l’agro-écosystème. La proximité des différentes plantes favorise les échanges mutuels, l’agro-écosystème est davantage interconnecté formant ainsi un macro-organisme. Cela augmente la production globale par unité de surface, tout augmentant la résilience face aux bio-agresseurs, stress hydriques …

Vue latérale de deux lignes syntropiques de 3 ans à la ferme du domaine du possible avec des frênes, figuiers, saules etc.
Ligne syntropique de 3 ans
Domaine du possible – PACA
Vue latérale de deux lignes syntropiques de 3 ans à la ferme du domaine du possible avec des frênes, figuiers, saules etc.
Ligne syntropique de 3 ans
Domaine du possible – PACA
Une ligne syntropique prise de face où l'on voit bien la stratification et la densité, à la ferme du Bosquet
Agro-écosystème de 5ans
La ferme du Bosquet – Gironde
Une ligne syntropique prise de face où l'on voit bien la stratification et la densité, à la ferme du Bosquet
Agro-écosystème de 5ans
La ferme du Bosquet – Gironde

Succession dans le temps

En agriculture syntropique, nous cherchons à mimer la succession naturelle qui a lieu dans un écosystème naturel. La succession écologique est le processus naturel d’évolution et de développement d’un écosystème en une succession de stades. Ainsi nous faisons en sorte qu’à chaque stade de la succession, une multitude de plantes adaptées aux conditions de fertilité présentes poussent. L’idée est qu’à chaque étape de la succession nous ayons des productions à récolter. Le design de tels agroécosystèmes, nécessitent donc de se projeter sur le temps long, en combinant des plantes de productions avec des plantes supports.

Stratification dans l’espace

En syntropie, la stratification des plantes est une notion délicate à appréhender, tant nos modèles culturaux ont été orientés depuis de nombreuses décennies vers des monocultures de plantes cultivées en plein soleil. Pourtant, nous pouvons observer que certaines plantes préfèrent se déployer à l’ombre. En pratique, l’agriculture syntropique invite à observer le besoin en lumières des plantes environnantes, pour le mimer au sein de l’agro-écosytème. On obtient ainsi des systèmes multi-étagés, où les végétaux se déploient dans leurs conditions optimales de lumière pour favoriser leur croissance en bonne santé.

Un exemple de ligne syntropique à la ferme des Bocaux d'amour
Ligne syntropique de 2ans
Ferme des Bocaux d’Amour – Bourgogne
Un exemple de ligne syntropique à la ferme des Bocaux d'amour
Ligne syntropique de 2ans
Ferme des Bocaux d’Amour – Bourgogne
Une personne effectuant la taille de perturbation sur une ligne syntropique à la ferme la Jungle Mallemortaise
Taille de perturbation sur canne de provence
Jungle Mallemortaise – PACA
Une personne effectuant la taille de perturbation sur une ligne syntropique à la ferme la Jungle Mallemortaise
Taille de perturbation sur canne de provence
Jungle Mallemortaise – PACA

Perturbation

La notion de perturbation désigne une détérioration naturelle et provisoire d’un écosystème qui conduit à un changement des caractéristiques du milieu. Naturellement ce phénomène est présent par des perturbations abiotiques (vent, feu, inondation…) ou biotiques (troupeau de mammifères, castors…). En syntropie nous utilisons la taille de perturbation pour maintenir l’agro-écosytème dans une dynamique de croissance optimale. Cette taille permet de stimuler les interconnexions entre les plantes, augmenter la quantité de photosynthèse suite à l’ouverture du milieu, et de venir remettre de la fertilité au sol sous forme organique.

L’agriculture syntropique en pratique

L’agriculture syntropique, c’est d’abord et avant tout un changement de perspective. C’est une nouvelle proposition de lecture et de compréhension du vivant, qui cherche à mimer l’écosystème environnant au sein de la parcelle agricole. C’est une philosophie avec le respect du vivant au cœur des préoccupations. Respecter la nature, c’est respecter l’humain, car l’être humain fait partie intégrante du vivant et de ses processus. Le lien entre la Nature et les Hommes, c’est la dynamique essentielle de ce type d’agriculture.

Le but est de concevoir des agroécosytèmes productifs qui tendent vers l’abondance et l’harmonie . Favoriser la vie est la meilleure façon de faire lien avec notre biosphère, en respectant sa merveilleuse intelligence. Plus que jamais, nous avons besoin de recréer ce lien essentiel avec la Terre, car nous ne pouvons pas vivre sans elle.

Matière organique, branchages taillés remis au sol après une action de perturbation

Favoriser la vie et ses processus

Interagir et favoriser l’installation avec les auxiliaires, micro et macro faune.

La taille de perturbation dans l’avancée de la succession du système.

Ne pas arracher une plante , geste de couper et de redéposer au sol pour couvrir et nourrir.

Vision globale de la ferme en tant que macro-organisme.

Une agriculture sans intrant extérieur

Dans l’agriculture syntropique, aucun fertilisant, produit chimique, et apport de biomasse externe n’est utilisé. Les plantations sont non irriguées, dans la mesure du possible. Le but est de limiter au maximum les apports exogènes. Néanmoins, pour que la plantation démarre bien, on s’autorise à fertiliser et à irriguer à la plantation. Ensuite, si une plante installée se plaît, qu’elle se développe naturellement, c’est que le terrain est propice à son expansion et que les conditions nécessaires à son développement sont réunies. Si elle ne s’y plait pas, elle ne se développe tout simplement pas. L’agriculteur a pour objectif d’optimiser la dynamique de croissance de l’agro-écosystème.

Le système a vocation à être autonome en terme de fertilisation, grâce aux plantes ayant un rôle de production de biomasse. Ces plantes sont régulièrement taillées et la matière fraiche est restituée au sol de manière organisée (en essayant de maximiser le contact avec le sol). Cela permet un apport de matière organique en même temps qu’une entrée de lumière dans le système.

Vue de plusieurs lignes d'une parcelle syntropique à la ferme du Bosquet en Gironde
Matière organique, branchages taillés remis au sol après une action de perturbation

Récolter le soleil et cultiver l’eau

Texte à écrire

Aller plus loin

Vidéo « Life in Syntropy »

Présentation de l’agriculture syntropique par Ernst Götsch et de sa ferme la « Fazenda Olhos D’Água ».

« Les lois (de la nature) nous sont données, ce n’est pas à nous de les créer ou de les modifier. A nous d’agir de manière bénéfique pour tous les acteurs concernés, afin d’être considérés comme des êtres utiles et bienvenus dans le système. » – Ernst Götsch

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